mardi 24 janvier 2012

Léa est bien trop jeune pour mourir

J’ai reçu plusieurs mails cette semaine, genre « alors Léa, t’as rien à dire sur la naufrage du Concordia ? ». Alors si… figurez-vous, j’ai un million de choses à dire. Ce truc m’a bouleversée. Mais en ce moment, je prépare mon déménagement et donc, je manque un peu de temps. (oui, pour moi, une nouvelle étape de ma vie commence, je vous raconterai ça dans un prochain post…)


Oui, j’ai été bouleversée par les images. Ces buildings flottants semblent pouvoir dominer le monde et puis, ils sont comme tout le monde… fragiles. Ça m’a un peu rappelé les twin towers de Manhattan un fameux 11 septembre. On voit ces trucs fiers, insurmontables, solides… et puis d’un coup. Badaboum.


Bon… aux dernières nouvelles (mardi 24 janvier à midi), il n’y aurait « que » 15 morts et 19 disparus. Sur les 4229 passagers et membres d’équipage embarqués, il n’y aurait donc « que » 1% de perte. Bien entendu, chaque perte humaine est inestimable.


Dans la « liste » des disparus, je trouve assez indécent qu’on distingue les passagers des membres d’équipage et qu’on les « classe » par nationalité. Comme si un passager français avait plus ou moins de valeur qu’un passager hongrois…


Lundi dernier, Libé publiait le témoignage d’un serveur sud-américain et titrait « Les héros, c’est nous : Colombiens, Honduriens, Chinois… Le serveur sud-américain racontait comment l’équipage, composé de gens de 20 nationalités, a sauvé, selon lui, au moins 500 personnes dans le naufrage du Costa Concordia... » Pendant que le commandant avait glissé dans une chaloupe (c’est ballot, ça… tiens…) contrairement au précepte bien connu du « le commandant est le dernier qui quitte le navire »


Bon, la où on est tous d’accord, c’est pour dire que le commandant de bord semble être une belle ordure. « Ouh la la, la bloggeuse déraille » vous dîtes-vous… Non ! Je reprends ce que dit la presse ! Il s’appelle Francesco Schettino, et même si chacun a le droit de bénéficier de la présomption d’innocence, reconnaissons à ce Monsieur le titre peu envié de « personne la plus détestée d’Italie ». C’est son titre officiel. Berlusconi doit peut-être regretté d’avoir quitté le pouvoir.


Francesco Schettino a tout du genre de mec a qui tout réussit… à qui rien ni personne ne pourra résister… bronzé, la chemise ouverte sur un poitrail velu (il ne manque plus que la médaille de la sainte vierge), on l’imagine très bien prendre le micro pour entonner « love boat » ou faire une blague graveleuse. Le côté vieux beau gominé sur le retour, sorte de crooner mitigé de Berlusconi me débecte un peu. Mais c’est un avis personnel… mais il me rappelle un peu un homme politique français qui aurait récemment « raté son rendez-vous avec les Français ». Le même regard qui déshabille. Mais je m’égare…


Il semblerait quand même (selon les premiers éléments de l’enquête) que le commandant ait demandé à son équipage de frôler d’un peu près les côtes de l’Adriatique pour les « saluer », contrairement aux procédures en place dans la compagnie.
Bon. La justice a été saisie et puis, il parait qu’on ne tire pas sur une ambulance.


Ce billet est destiné aux professionnels du tourisme, donc abordons cette catastrophe d’un point de vue professionnel. Reconnaissons à Georges Azouze et ses équipes leur grand professionnalisme, leur réactivité et leur dignité. (même si eux aussi, ont commencé à tirer à boulets rouges sur le commandant en question). Et espérons que les agents de voyages et surtout les clients ne fassent pas d’amalgame entre cette catastrophe unique et le nombre de bateaux de croisière qui circulent tous les jours sur tous les océans et mers du monde sans dommage.


Parce que depuis quelques années, entre les catastrophes dans les transports, les crises naturelles (genre tsunami, tremblement de terre ou inondations) et les événements politiques, c’est quand même bien compliqué.


La croisière semblait être le produit miracle : pas de risque de moyen de transport bloqué par une grève des pilotes, des contrôleurs ou des hôtesses… pas de bagage perdu (il suit le client…), pas de surbooking, pas de problème géopolitique (au pire, on reroute le bateau…), on peut vendre la croisière les yeux fermés ! et bien non, le produit miracle n’existe pas !


D’ailleurs, je ne sais pas si vous avez remarqué, mais la presse est unanime : on va tous crever.
Je me faisais la réflexion jeudi dernier. Comme c’est « plutôt calme » en ce moment à l’agence, j’avais pris une journée de récup pour faire les soldes. Les rues étaient noires de monde. Les boutiques vomissaient de clientes qui portaient des sacs à chaque bras…


Moi, je n’ai rien acheté. J’ai eu un petit coup de déprime. Parce que même si les trois-quarts des boutiques devaient presque refuser du monde, les agences de voyages restaient inexorablement vides.


Voir ces agences de voyages vides me fait vraiment déprimer. Chez Big-Boss voyages, on met de la musique pour s’ôter cette pesante impression de silence. Chez nous, encore, on est nombreux… donc voir ces vendeurs alignés derrière le comptoir comme des mannequins donne l’impression que l’agence tourne… et puis le volume d’activité aux sociétés est assez soutenu, donc le téléphone sonne un peu…


Mais chez la plupart de mes confrères, je vois le plus souvent deux filles, parfois une seule (mais comment fait-elle pour survivre ?) dans des boutiques vides.
Je n’ai pas envie que les agences de voyages « de quartier » disparaissent comme les petites librairies et les disquaires indépendants ont disparu dans les années 80 et 90. Pourtant, je m’inquiète.


Les petites agences ferment les unes après les autres, les réseaux régionaux (moi, je n’arrive pas à appeler « mini réseaux » des trucs à 25 points de vente) ferment des boutiques (pardon… elles ne ferment pas : elles « rationalisent leur maillage », mais en gros, le résultat est le même...)


En ce moment, il semble que tout le monde flippe : dans le monde de la distribution, on s’observe… j’ai surtout l’impression qu’on fait tous la même chose : on essaie de fidéliser notre portefeuille clients, on tente par tous les moyens de se faire remarquer de ceux qui nous ignorent et… on sert les fesses.


On lutte contre les mutuelles qui vendent la même chose que nous (mais moins cher), on lutte contre les pure-players (chez Big-Boss Voyages, on a accès à la base de données d’Expedia… et on gagne quand même 11%...), on se bat contre les réceptifs qui vendent en direct… et là, on flippe de voir débarquer « google travel » sur nos plates-bandes.


Je n’ai pas du tout compris en quoi ça allait nous faire de la concurrence, mais on a survécu aux usines de vacances en promo dégriffées de dernière minute sur internet, aux call-centers puis aux sites web des compagnies aériennes en direct, à Trip Advisor et aux ventes privées… dans le combat du pot de terre contre le pot de terre, je reste encore optimiste. Et tant que je n’ai pas compris ce qu’allait être « Google travel », je peux encore dire « même pas peur… »


Mais quand même, dites moi… on va pas tous crever, hein ?


Parce que ce mercredi, on va savoir si runaworld fait la faillite ou si l’activité continue… Comment pourrait se casser la figure une si grosse agence de billetterie… filiale du Crédit agricole, au capital d’1,4 M€, qui a développé des solutions technologiques hors-pair, qui promet de SBT super-efficaces et des statistiques au service des entreprises (et de leurs politiques d’achat), des frais de gestion comprimés parce que « tout le boulot opérationnel est fait par les entreprises » ? Si une agence à l’apparence aussi solide peut faire faillite, comment on fait, nous, les petites agences de détail, pour s’en sortir ?


On travaille sur les marchés de niche ?
Le tour-operator ATTITUDE TRAVELS, l’un des très rares à proposer des voyages « gay » en France a aussi déposé son bilan le mois dernier. Pourtant, elle avait un bassin de clientèle super important : 5 à 7% de la population française » serait gay selon Max. (et 80% des contacts téléphoniques enregistrés dans son blackberry, mais ça n’a rien à voir). Et ben, faillite quand même… C’est expliqué là :
http://www.attitude-travels.com/


On se lance dans le package dynamique tout simple ? avec des marges faibles mais une techno infaillible qui permet de compresser les coûts au maximum ? C’était le modèle économique de neofly qui a pourtant fait faillite il y a quinze jours…




Et je ne parle même pas de cette agent de voyage de Chinon qui vendait des billets d’avion et qui « oubliait » de les émettre…


Bref, à ce rythme là, on devrait tous crever… et si il n’y a plus d’agence de voyages, je ne sais pas pour qui je vais écrire…


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